Dans un geste historique, la Cour pénale internationale (CPI) a délivré aujourd'hui des mandats d'arrêt à l'encontre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et du ministre de la Défense Yoav Gallant, citant des « crimes contre l'humanité et des crimes de guerre commis à partir du 8 octobre 2023 au moins ». La CPI estime qu'ils sont tous deux responsables du « crime de guerre consistant à utiliser la famine comme méthode de guerre et des crimes contre l'humanité consistant à commettre des meurtres, des persécutions et d'autres actes inhumains ». La CPI a également délivré un mandat d'arrêt à l'encontre de Mohammad Al-Masry (communément appelé Deif), chef de la branche militaire du Hamas.
Le procureur de la CPI, Karim Khan, avait déposé des demandes d'arrestation en mai 2024. Elles concernaient également Yahya Sinwar, qui a été tué lors d'un combat avec les forces d'occupation israéliennes à Gaza le mois dernier, et Ismail Haniyeh, qu'Israël a assassiné en Iran en juillet. Selon Al Jazeera, le Hamas avait rejeté la décision de la CPI contre des membres de sa direction, affirmant que les victimes étaient assimilées au bourreau.
Dans les mandats d'arrêt, la Chambre déclare avoir « trouvé des motifs raisonnables de croire » que Netanyahou et Gallant « portent chacun la responsabilité pénale des crimes suivants : crime de guerre en recourant à la famine comme méthode de guerre et crimes contre l'humanité de meurtre, persécution et autres actes inhumains ».
Maintenant que les mandats ont été délivrés, les 124 pays signataires du Statut de Rome sont légalement tenus de respecter la décision de la Cour et donc d'arrêter les auteurs s'ils se trouvent sur leur sol.
Cependant, la CPI ne reconnaît pas le problème de fond, comme l'a écrit Noura Erakat dans le Washington Post en mai : « Le statut de Rome, qui a créé la Cour, ne considère pas le colonialisme comme un crime essentiel. »
L'absence du contexte historique et politique et crée un problème majeure. Noura Erakat a précisé : « Les pires crimes commis par d'anciennes puissances coloniales - en l'occurrence, les déplacements forcés et la répression des Palestiniens par Israël pendant des décennies - sont hors de portée de la justice ».
Dans son article, Noura Erakat explique également que la CPI n'est pas nécessairement un vecteur de justice, mais qu'elle sert à créer un précédent. Elle offre un aperçu précieux en déclarant que « la demande de mandats d'arrêt brise enfin le tabou de l'inculpation d'Israël et remet en question le paradigme qui a fait s'effondrer la sécurité juive avec les crimes de l'État israélien ». Bien que les mandats, à eux seuls, n'apporteront pas la justice, ils ont fissuré le mur qui a protégé Israël de la responsabilité et bloqué le droit palestinien à la vie et à la dignité ».
Après l'émission des mandats aujourd'hui, elle a posté sur la plateforme de médias sociaux X : « Soit la CPI poursuit avec succès Netanyahu et Gallant, soit les États-Unis démolissent la Cour internationale pour se protéger et protéger les autres accusés de crimes de guerre. Dans les deux cas, c'est une victoire, car les États-Unis (et Israël) continuent de montrer leur vrai visage et s'isolent davantage au niveau mondial.
Le Centre international de justice pour les Palestiniens (ICJP) a publié une déclaration saluant la décision maist la qualifiant de « tardive ». IL demande à la CPI « d'engager des poursuites pour un plus grand nombre de chefs d'accusation, y compris à l'encontre d'autres auteurs ».
Selon Reuters, un porte-parole de la Maison Blanche a déclaré que les États-Unis rejetaient cette décision, accusant la CPI d'avoir commis des « erreurs de procédure ». Des hommes politiques américains ont également exprimé leur dédain. Le député républicain Mike Waltz, qui est également le conseiller de Trump en matière de sécurité nationale, a accusé la CPI de « préjugés antisémites ».
En juin, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté un projet de loi visant à sanctionner la CPI après que son procureur a annoncé son intention de demander des mandats d'arrêt. Le projet de loi n'a pas été présenté au Sénat depuis lors et ne devrait pas devenir une loi, selon Reuters. Toutefois, à la lumière de l'actualité récente, Brad Sherman, membre démocrate du Congrès, a qualifié la décision d'émettre des mandats de « perversion de la justice » en défendant les actions d'Israël à Gaza et en plaidant pour que les États-Unis sanctionnent la CPI.
Cette réaction contraste fortement avec le sentiment partagé lorsque la CPI a émis un mandat d'arrêt à l'encontre de Vladimir Poutine, les États-Unis ayant applaudi la décision en affirmant qu'elle était justifiée. Les États-Unis ne sont pas signataires du Statut de Rome.
Dans un acte de solidarité, le maire de Dearborn, Abdullah Hammoud, a écrit sur X que « Dearborn arrêtera Netanyahu et Gallant s'ils entrent dans les limites de la ville de Dearborn ». Il a également invité d'autres villes à prendre des mesures similaires face à l'inaction du président américain Joe Biden.
Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a déclaré que le Canada se conformerait à tous les règlements et à toutes les décisions de la CPI. Le responsable de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, a déclaré que « la décision de la Cour devrait être “respectée et mise en œuvre” ». Parallèlement, les Pays-Bas ont annoncé qu'ils étaient tout à fait prêts à appliquer le Statut de Rome et à arrêter Netanyahu et Gallant. Le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a également réaffirmé « que la réaction de la France à la décision sera conforme aux statuts de la Cour ».
La réaction des Etats-Unis prouve qu'ils soutiennent le génocide commis par Israël à l'encontre des Palestiniens de Gaza, au mépris du droit et de l'ordre international.