La disparition de Maxime Rodinson, en ces temps de disparitions multiples, est celle d’un repère décisif dans notre capacité à penser le monde. Je dois d’emblée le confesser, mon admiration et mon amitié pour lui, quelque part même mon identification assumée avec sa démarche, m’interdisent toute prétention à l’objectivité, et je ne tenterai donc pas ici de dresser un bilan équilibré, ou un tableau quantifié des affirmations, prises de position et idées qu’il a défendues et formulées au cours de sa longue marche, aussi bien militante qu’universitaire.
Tenter de dire quelque chose, cependant, à propos du rapport de Maxime à sa « judéité », sans, de ce fait même, le trahir, et sans sombrer dans les désordres d’un délire identitaire dont il n’avait que faire, est une entreprise risquée, et le lecteur me pardonnera de n’avancer sur ce chemin qu’avec la plus extrême prudence.